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Sainte Bernadette

À une heure où s’effondrent les grandeurs d’établissement, c’est à la société tout entière que s’adresse le sévère avertissement de la Très Sainte Vierge :
Je ne vous promets pas de vous rendre heureuse dans ce monde mais dans l’autre.
Que les sociétés chrétiennes qui veulent renaître ça et là sur le globe de la terre écoutent le chant qui s’élève sur les bords du Gave, chant de l’humilité, de la petitesse et de l’innocence.
Ô sainte Bernadette, ô cœur d’enfant pur comme une source, vrai miroir de l’Immaculée ! N’êtes-vous pas le chef-d’œuvre de Marie, sa confidente et son plus beau miracle ? Depuis que l’Église vous a proposée à notre affectueuse vénération, pouvons-nous désormais rendre un culte à la Mère de Dieu sans nous souvenir qu’elle-même vous a formée et façonnée pour être notre modèle ?
Obtenez-nous, chère sainte, d’être comptés au nombre des âmes qui sont comme vous captivées et ravies par la beauté de la Vierge Immaculée, se mettent à son école, suivent ses traces, écoutent ses conseils. Apprenez-nous à travailler dans l’espérance du ciel, à ne chercher que la Volonté de Dieu au sein d’une vie humble et cachée, acceptant de mourir, comme le grain tombé en terre dont parle l’Évangile, afin de produire du fruit. Débarrassez-nous de ce personnage important que nous sommes ; faites-nous accepter nos limites, rire de nos échecs, embrasser la croix et boire joyeusement à la coupe des humiliations. Obtenez-nous la grâce de travailler comme le serviteur inutile et d’être traités comme le balai qu’on remise derrière la porte après s’en être servi, image sous laquelle vous avez voulu vous dépeindre vous-même. Apprenez-nous à travailler à quelque grand dessein qui nous dépasse, à labourer dans l’ignorance des fruits, à porter dans le cœur de vastes intentions, et à les réaliser dans la perfection du détail caché et vulgairement quotidien. Apprenez-nous à réciter le chapelet et, de chapelet en chapelet, à gravir les marches du trône, jusqu’aux pieds de l’Immaculée où pour la dernière marche, n’est-ce pas, vous nous tendrez la main !

La Croix

Jésus crucifié au sommet du Calvaire, pacifiant par le sang de la Croix tout ce qui est au ciel et sur la terre, c’est là le signe par excellence où se reconnaissent les chrétiens. C’est cette Croix qu’on enseigne aux enfants et aux mourants à regarder, à baiser, à étreindre, elle est le signe qui remplir l’univers, où se révèle la véritable histoire de l’humanité, terreur des démons, réponse à nos angoisses, clef mystérieuse et unique, seule capable de donner à l’âme l’intelligence de cet affreux labyrinthe où siège le mal et son cortège de souffrances. Parce qu’elle cristallise à elle seule le sang, les larmes, les supplices de l’Homme-Dieu, la Croix détient le plus grand secret de l’humanité de tous les temps, qui est l’amour infini de Dieu pour les enfants des hommes. (…)
Elle est le signe d’une délivrance et d’une victoire unique dans le déroulement des siècles : malheur à celui qui rougirait de la Croix du Christ ! Saint Paul nous enseigne même à mettre en elle notre fierté et notre gloire. C’est peut-être cela qu’il faudrait creuser pour entrer dans la plénitude du mystère pascal, qui est Passion, Mort et Résurrection.

La Poésie

Nous faisons peu usage de la poésie. Nous demandons peu de chose aux poètes, ces magiciens d’un frêle bonheur ; nous demandons peu de chose aux ambassadeurs de l’été, porteurs d’une lointaine enfance avec laquelle, grâce à Dieu, nous gardons de secrètes attaches. Pourquoi Platon, lui-même grand poète, les a-t-il mis à la porte de la République ? . Toute civilisation digne de ce nom baigne dans un univers de poésie. C’est la poésie qui maintient l’homme en relation vivante avec les valeurs pour lesquelles il consent à mourir : la Religion, la Patrie, « et les pauvres honneurs des maisons paternelles . Les générations de la Grèce antique se sont formées en récitant par cœur les chants de l’Iliade ; le Moyen Age en écoutant les chansons de geste, en récitant les psaumes de David, en jouant le jeu grave et profond de la liturgie à l’intérieur des cathédrales, véritables poèmes de pierre où nos ancêtres ont inscrit l’image de notre destin. (…)
La paysannerie s’est maintenue fidèle à son noble lignage aussi longtemps que les anciens, écoutés et respectés, purent transmettre aux plus jeunes, au cours des veillées, le trésor des contes, des légendes, des chansons du terroir et la beauté des coutumes qui sont des poèmes en action. Toute une sagesse venue du fond des âges. Le mois de Marie fait partie de ce legs. C’est une œuvre de poésie aussi sérieuse que les traités des docteurs sur les privilèges de la Mère de Dieu. Cela est situé dans un autre registre ; voilà tout. Née dans le cœur et l’imagination des fidèles, cette institution ne dépend ni du magistère (aucune encyclique sur le sujet) ni de la liturgie (aucune grande fête mariale).

Le Rosaire

La répétition d’une formule appartient à l’art de prier de tous les temps ; elle n’a comme objet que de calmer les sens et de fixer avec douceur le regard sur des choses invisibles. Il est difficile d’arrêter son regard sur un objet, sans en être fatigué ou détourné par la mobilité de l’esprit. L’Ave Maria, en sa répétition simple et régulière, est comparable à ce que fait dans le monde physique une onde porteuse. Son rôle consiste moins à instruire, qu’à capter et à soutenir un mouvement de l’âme. C’est peu de chose, n’est-ce pas ? Mais dites-le moi : qu’est-ce que les fiancés de la terre se répètent à l’envi ? Les pauvres paroles dont se contentent les cœurs aimants, ne sont-elles pas chargées d’une réalité qui dépasse les mots ? Parvenus à un certain étage de vérité, les mots ne sont plus à chercher ; ils se savent impuissants, et acceptent de se redire.
René Descartes nous a joué un vilain tour avec ses idées claires et distinctes. Vous comprenez bien que le tout de la vie surnaturelle déborde un peu le cadre des classifications de l’esprit ! Le mouvement d’admiration par lequel l’âme se porte vers un grand spectacle ; les doux transports de l’hymen le plus banal ; les intuitions du cœur et celles de l’univers poétique ; tout cela, et bien d’autres choses encore refusent de se laisser enfermer dans des idées claires et facilement formulables.
Pour tout vous dire, la récitation du chapelet, comme les psaumes, comme les litanies du Saint Nom de Jésus, s’apparente davantage au chant et à l’effusion, qu’à celui l’enseignement didactique. C’est pourquoi je vous exhorte à y apporter surtout la simplicité du cœur et l’esprit d’enfance.