
Sainteté et perfection (Sainte Thérèse de l'Enfant Jésus)
Sainteté et perfection
Longtemps, je me suis demandé pourquoi le Bon Dieu avait des préférences, pourquoi toutes les âmes ne recevaient pas un égal degré de grâces… Jésus a daigné m’instruire de ce mystère, il a mis devant mes yeux le livre de la nature et j’ai compris que toutes les fleurs qu’il a créées sont belles, que l’éclat de la rose et la blancheur du lys n’enlèvent pas le parfum de la petite violette ou la simplicité ravissante de la pâquerette. J’ai compris que si toutes les petites fleurs voulaient être des roses, la nature perdrait sa parure printanière, les champs ne seraient plus émaillés de fleurettes.
Ainsi en est-il dans le monde des âmes qui est le jardin de Jésus. Il a voulu créer les grands saints qui peuvent être comparés au lys et aux roses mais il en a créé aussi de plus petits et ceux-ci doivent se contenter d’être des pâquerettes ou des violettes destinées à réjouir les regards du Bon Dieu lorsqu’il les abaisse à ses pieds ; la perfection consiste à faire sa volonté, à être ce qu’il veut que nous soyons.
J’ai compris encore que l’amour de Notre Seigneur se révèle aussi bien dans l’âme la plus simple qui ne résiste en rien à sa grâce que dans l’âme la plus sublime ; en effet le propre de l’amour étant de s’abaisser, si toutes les âmes ressemblaient à celles des Saints docteurs qui ont illuminé l’Église par la clarté de leur doctrine, il semble que le Bon Dieu ne descendrait pas assez bas en venant jusqu’à leur cœur, mais il a créé l’enfant qui ne sait rien et ne fait entendre que de faibles cris, il a créé le pauvre sauvage n’ayant pour se conduire que la loi naturelle et c’est jusqu’à leur cœur qu’il daigne s’abaisser, ce sont là ses fleurs des champs dont la simplicité le ravit. En descendant ainsi le Bon Dieu montre sa grandeur infinie. De même que le soleil éclaire en même temps les cèdres et chaque petite fleur comme si elle était seule sur la terre, de même Notre Seigneur s’occupe aussi particulièrement de chaque âme que si elle n’avait pas de semblables.
Silence et parole de Dieu (Bienheureux Guerric d'Igny)
Silence et parole de Dieu
“Ceux-là entendent la Parole, ils l’accueillent, et ils portent du fruit”
Assurément, c’est “une parole sûre et qui mérite d’être accueillie sans réserve” (1Tm 1,15) que ta Parole toute-puissante, Seigneur ! Descendue en une telle profondeur de silence du haut des demeures royales du Père (Sg 18,14s) jusque dans une mangeoire d’animaux, elle nous parle mieux pour l’instant par son silence. “Celui qui a des oreilles pour entendre, qu’il entende” ce que nous dit ce saint et mystérieux silence du Verbe éternel…
Y a-t-il rien, en effet, qui inculque la règle du silence avec autant de poids et d’autorité, rien qui réprime le mal inquiet de la langue et les tempêtes de la parole…, que la Parole de Dieu silencieuse parmi les hommes ? “La parole n’est pas encore sur ma langue” (Ps 138,4) semble proclamer la Parole toute-puissante lorsqu’elle se soumet à sa mère. Et nous, avec quelle démence nous disons : “Nous vanterons notre langue, nos lèvres sont pour nous, qui sera notre maître ?” (Ps 11,5) Qu’il me serait doux, si cela m’était permis, de garder le silence, de m’effacer et de me taire, même à propos du bien, pour pouvoir prêter une oreille plus attentive, plus recueillie, aux mots secrets et aux significations sacrées de ce divin silence ! Qu’il me serait bon de me mettre à l’école du Verbe pour autant de temps que le Verbe lui-même a gardé le silence à l’école de sa mère…
“Le Verbe s’est fait chair et il a demeuré parmi nous” (Jn 1,14). Mettons donc toute notre dévotion, frères, à méditer sur le Christ enveloppé des langes dont sa mère l’a couvert, afin de voir, dans la joie éternelle du Royaume, la gloire et la beauté dont son Père l’aura revêtu.
Silence et sainteté (Bienheureuse Teresa de Calcutta)
Silence et sainteté
Pour devenir saint, nous avons besoin de l’humilité et de la prière. Jésus nous a enseigné à prier ; il nous a également appris à être doux et humble de cœur (Mt 11,29). Rien de tout cela ne conviendra si nous ne savons pas ce qu’est le silence. L’humilité et la prière s’approfondiront dans la mesure où l’oreille, l’esprit, et la langue auront vécu dans le silence avec Dieu, car c’est dans le silence du cœur que Dieu parle.
Silence et solitude (Saint Bruno)
Silence et solitude
Ce que la solitude et le silence du désert apportent d’utilité et de douceur à ceux qui les aiment, ceux-là seuls le savent qui en ont fait l’expérience. Là, en effet, les hommes forts peuvent se recueillir autant qu’ils le désirent, habiter avec eux-mêmes, cultiver avec force les germes des vertus et jouir avec bonheur de ces fruits du paradis. Là s’acquiert ce calme regard qui blesse d’amour le divin Époux et cet amour si pur dont on contemple Dieu. Là on travaille dans un calme labeur et on se repose dans une action pleine de paix. Là Dieu donne à ses athlètes pour le labeur du combat la récompense désirée; une paix que le monde ignore et la joie de l’Esprit Saint… Là est encore cette meilleure part que Marie a choisie et qui ne lui sera pas enlevée.
Solitude et union à Dieu (Bienheureux Charles de Foucauld)
Solitude et union à Dieu
Il faut passer par le désert et y séjourner pour recevoir la grâce de Dieu ; c’est là qu’on se vide, qu’on chasse de soi tout ce qui n’est pas Dieu et qu’on vide complètement cette petite maison de notre âme pour laisser toute la place à Dieu seul. Les Hébreux ont passé par le désert, Moïse y a vécu avant de recevoir sa mission, saint Paul, saint Jean Chrysostome se sont aussi préparés au désert. C’est un temps de grâce, c’est une période par laquelle toute âme qui veut porter des fruits doit nécessairement passer. Il lui faut ce silence, ce recueillement, cet oubli de tout le créé, au milieu desquels Dieu établit son règne et forme en elle l’esprit intérieur : la vie intime avec Dieu, la conversation de l’âme avec Dieu dans la foi, l’espérance et la charité. Plus tard l’âme produira des fruits exactement dans la mesure où l’homme intérieur se sera formé en elle (Ep 3,16).
On ne donne que ce qu’on a et c’est dans la solitude, dans cette vie seul avec Dieu seul, dans ce recueillement profond de l’âme qui oublie tout pour vivre seule en union avec Dieu, que Dieu se donne tout entier à celui qui se donne ainsi tout entier à lui. Donnez-vous tout entier à lui seul et il se donnera tout entier à vous. Regardez saint Paul, saint Benoît, saint Patrice, saint Grégoire le Grand, tant d’autres : quel long temps de recueillement et de silence ! Montez plus haut : regardez saint Jean Baptiste, regardez notre Seigneur. Notre Seigneur n’en avait pas besoin, mais il a voulu nous donner l’exemple.