C comme…

C comme… confiance et abandon (S. François de Sales)

DE LA CONFIANCE ET ABANDONNEMENT

Non seulement l’âme qui a la connaissance de sa misère peut avoir une grande confiance en Dieu, mais elle ne peut avoir une vraie confiance qu’elle n’ait la connaissance de sa misère; car cette connaissance et confession de notre misère nous introduit devant Dieu. Aussi, tous les grands Saints, comme Job, David et autres, commençaient toutes leurs prières par la confession de leur misère et indignité; de sorte que c’est une très bonne chose de se reconnaître pauvre, vil et abject, et indigne de comparaître en la présence de Dieu. (…) J’ai accoutumé de dire que le trône de la miséricorde de Dieu c’est notre misère : il faut donc, d’autant que notre misère sera plus grande, avoir une plus grande confiance, car la confiance est la vie de l’âme : ôtez-lui la confiance, vous lui donnez la mort.

Il y a beaucoup de gens qui disent à Notre-Seigneur : Je me donne tout à vous et ne veux rien réserver; mais il y en a fort peu qui embrassent la pratique de cet abandonnement, lequel n’est autre chose qu’une parfaite indifférence à recevoir les évènements selon qu’ils arrivent par ordre de la Providence divine : recevoir également l’affliction comme la consolation, la maladie comme la santé, la pauvreté, le mépris et l’opprobre comme les richesses, l’honneur et la gloire.

La volonté de Dieu signifiée, ce sont ses Commandements, ses conseils, ses inspirations, nos Règles et les ordonnances de nos Supérieurs. La volonté de son bon plaisir, ce sont les évènements des choses que nous ne pouvons pas prévoir, comme par exemple : je ne sais pas si je mourrai demain; si je tombe malade à la mort, je vois que c’est le bon plaisir de Dieu, et partant je m’abandonne à son bon plaisir et meurs de bon coeur.
Cet état du délaissement de nous-mêmes comprend aussi d’être abandonné au vouloir de Dieu en toutes tentations, aridités, sécheresses, aversions et répugnances qui arrivent en la vie spirituelle; car en toutes ces choses l’on y voit le bon plaisir de Dieu, quand elles n’arrivent pas par notre défaut 12, et qu’il n’y a pas du péché.

En quoi s’occupe intérieurement cette âme qui est toute abandonnée entre les mains de Dieu ? Elle ne fait rien, sinon demeurer auprès de Notre-Seigneur en une sainte oisiveté, sans avoir souci d’aucune chose, non pas même de son corps ni de son âme; car puisqu’elle s’est embarquée sous la Providence de Dieu, qu’a-t-elle à faire de penser qu’elle 18 deviendra? Notre-Seigneur auquel elle s’est toute délaissée y pensera assez.

Quand nous abandonnons tout, Notre-Seigneur prend soin de tout et conduit tout. Que si nous réservons quelque chose de quoi nous ne nous confions pas en lui, il nous la laisse, comme s’il disait Vous pensez être assez sage pour faire cette chose-là sans moi? je vous la laisse gouverner, mais vous verrez bien comme vous vous en trouverez.

Vous voulez encore savoir quel fondement doit avoir notre confiance. — Il faut qu’elle soit fondée sur l’infinie bonté de Dieu et sur les mérites de la Mort et Passion de Notre-Seigneur Jésus-Christ, avec cette condition de notre part, que nous ayons et connaissions en nous une entière et ferme résolution d’être tout à Dieu, et de nous tout abandonner, sans aucune réserve, à sa Providence.

S. François de Sales, Deuxième entretien (extraits)