G comme…

G comme… grâce actuelle

Les deux solitaires

Deux pères du désert s’occupaient d’extraire de la terre noire afin d’améliorer leur jardin légumier. Comme ils n’avaient ni véhicule, ni bêtes de somme pour la transporter, ils la mettaient dans des sacs dont ils chargeaient leurs épaules. Le plus jeune des deux, endurant avec peine les ardeurs du soleil et les piqûres des mouches, murmurait à chaque coup de bêche qu’il donnait. « Mon cher frère, dit le vieil anachorète, demandez à Dieu la patience. » – « Je l’ai-demandée assez souvent, répliqua l’autre, et sa grâce ne m’aide en rien. » – Le vieux père continua de bêcher en silence, jusqu’à ce que son sac fut de nouveau rempli, puis il dit : « Aide-moi, je t’en prie, à charger le sac sur mes épaules ». Et le jeune père de faire aussitôt ce qu’on lui demandait. Mais le vieil anachorète, par malice, tira le sac si fort en avant, que celui-ci tomba lourdement à terre, « que signifie ce manège ? s’écria son jeune compagnon, mon assistance ne vous servira de rien, si, de propos délibéré, vous la rendez stérile. » – « Eh bien, écoutez dit le vieillard ; il en est de l’assistance divine comme de la vôtre ; Dieu est toujours disposé à vous venir en aide, mais quand nous ne coopérons pas à sa grâce, quand, au contraire, nous y résistons, à quoi peut-elle servir ? Non, la grâce de Dieu ne nous fait jamais défaut, mais il faut, de notre côté, que nous l’acceptions et que nous en profitions. »